Comment j’ai perdu au jeu du « Qui est-ce ? » : illustration d’un paradigme d’interférence de la simulation sur la reconnaissance d’associations personnage-action en mémoire


Date
Oct 8, 2020 09:00 — Oct 9, 2020 18:00
Location
Montpellier, France

La cognition incarnée propose que la mémoire récréée (simule) de façon dynamique les expériences sensori-motrices passées afin de répondre aux contraintes de la situation présente, mais aussi d’anticiper les situations futures. Ce fonctionnement dynamique de la mémoire implique l’existence de distorsions mnésiques. Une « bonne » mémoire dépendrait alors de savoir dans quelle mesure une expérience sensorimotrice spécifique est précisément recréée. Il importe donc de montrer la place du mécanisme de simulation sensorimotrice dans des tâches où les performances mnésiques sont qualitativement mesurées. L’implication de la simulation peut être démontrée à travers deux types de paradigmes : un premier visant à faciliter la simulation, et un second à interférer avec cette même simulation. L’objectif de cette présentation est de proposer un exemple de paradigme d’interférence de la simulation dans une tâche où la précision de la réponse à générer était manipulée. L’hypothèse était que les interférences sensorielles générées par la présentation d’un masque visuel dynamique devaient perturber la simulation sensorimotrice d’une expérience spécifique et interagir avec le degré de précision de la réponse.

Afin de tester cette hypothèse, des participants ont mémorisé des vidéos montrant des personnages en train d’effectuer une action sur un objet. Les personnages étaient soit visuellement très similaires entre eux, soit fortement distincts. Lors de la phase de reconnaissance, une voix annonçait une des actions vues, puis un personnage était affiché pendant 1s. Un masque visuel dynamique perturbant les traitements visuels, ou un stimulus contrôle, était présenté avant et après ce flash du personnage. Les participants devaient indiquer si le personnage présenté correspondait à celui ayant réalisé l’action annoncée. Dans le cas d’une non-correspondance et dans la condition de forte similarité, la réponse à fournir devait être davantage précise que dans la condition de faible similarité. Les résultats ont montré que les participants étaient plus lents pour rejeter correctement une mauvaise association lors de la présentation du masque visuel pour les personnages distincts, mais pas pour ceux similaires.

Ces résultats montrent que les interférences générées par le masque visuel ont réduit la précision des souvenirs. Cet effet perturbateur n’est pas lié à l’attention (absence d’effet lors de la détection d’associations correctes), mais plutôt à la simulation sensorielle lors de l’émergence du souvenir. Cela suggère que la qualité de la recréation d’une expérience spécifique dépend de la capacité de simulation. Ce résultat implique donc un recouvrement des processus perceptifs et mnésiques comme prédit par l’approche incarnée via un mécanisme de simulation sensorimotrice.