Inaction et cognition : la sédentarité comme problématique de la cognition incarnée


Date
sept. 5, 2019 11:30 — 12:00
Lieu
Poitiers, France

L’action et le mouvement sont étroitement liés au fonctionnement cognitif (Witt, 2011). Chaque action entreprise est susceptible d’influencer le traitement cognitif permettant une adaptation de l’organisme à son milieu. Par exemple, des joueurs de softball experts perçoivent la taille de la balle comme étant plus grande comparativement à des novices (Witt & Proffitt, 2005). À l’inverse, de mauvaises dispositions corporelles (être fatigué, porter une charge lourde…) amènent des adultes à percevoir la pente d’une colline comme étant plus raide (Proffitt, 2006). Le traitement cognitif dépend donc non seulement de la capacité à agir (provenant de l’expérience et des dispositions physiologiques), mais aussi de son coût énergétique (Proffitt, 2006). Cette association entre la dépense énergétique et le fonctionnement cognitif est maintenant bien établie dans le domaine de l’activité physique (Hötting & Röder, 2013) ; cependant, la relation inverse demeure peu explorée. Ainsi, l’adoption d’un mode de vie sédentaire (prédominance de la position assise), venant en opposition directe avec le besoin physiologique de dépense énergétique chez l’être humain (Cordain, Gotshall, Eaton, & Eaton, 1998), pourrait influencer négativement son fonctionnement cognitif(e.g., Bakrania et al., 2018). Cette hypothèse fait de la sédentarité un domaine d’étude particulièrement saillant pour la cognition incarnée, qui est une approche permettant d’expliquer les effets de l’absence de dépense énergétique et de la réduction des capacités d’action (e.g., diminution de l’endurance, de l’efficience musculaire, de l’adaptation cardiovasculaire) sur le fonctionnement cognitif.

Néanmoins, il est difficile de conclure à une association entre sédentarité et cognition en raison de biais méthodologiques dans les études (utilisation de mesures différentes pour évaluer la sédentarité et la cognition, trop grande hétérogénéité des populations étudiées, absence du contrôle du niveau d’activité physique des participants ; Magnon, Vallet, & Auxiette, 2018). Une autre limite majeure est que la sédentarité a été mesurée principalement sur le court terme, alors qu’il est probable que les effets cognitifs de la sédentarité n’apparaissent que suite à l’accumulation de comportements sédentaires au cours de la vie (Magnon, Vallet, & Auxiette, 2018). Ce dernier point révèle l’importance de considérer la sédentarité comme un mode de vie, caractérisé par une faible dépense énergétique au quotidien et une réduction des capacités d’actions, qui entraînerait des conséquences psychologiques sur le long terme, notamment dans le cadre du vieillissement cognitif.

Après avoir développé cette proposition de définition psychologique de la sédentarité (Magnon, Dutheil, & Auxiette, 2018), cette intervention introduira une synthèse des liens entre sédentarité et cognition pour finir par la présentation des résultats d’une étude exploratoire testant les conséquences d’un mode de vie sédentaire sur la cognition auprès d’étudiants.